Article paru dans le journal paroissial 'Ensemble" n° 99 de septembre 1986
Auteur inconnu à ce jour.
LE TERROIR DE BIRAC
Les communes de la rive droite du Beuve
sont toutes bâties sur le même modèle elles occupent l'intervalle entre deux
affluents successifs. Birac cependant, étant la première de la série, est bien
limitée au nord par le premier affluent véritable, mais au sud c'est la ligne
qui partage les eaux qui vont vers le bassin du Beuve et celles qui vont vers
le Ciron. Avec une addition au moment de la formation des communes, en 1790 la
petite paroisse de Sauros a été ajoutée à Birac. Mais, au fil des siècles, le
terroir de Birac avait déjà connu deux avatars.
Son nom, terminé AC, fait penser que Birac est né d'un
domaine gallo-romain, tout naturellement implanté sur les meilleures terres, là
où le plateau domine le vallon ; l'église est au milieu de ces terres, le
château y était aussi. Après cette période d'épanouissement,
l'insécurité, vers le Xe ou le XIe siècle, oblige un peu
partout les habitants à assurer leur défense ; plus tard, les seigneurs, avec
leur château, rempliront ce rôle en bien des endroits ; mais auparavant il y a
eu, ici ou là, formation de petits bourgs fortifiés, avec une église,
construits sur une « motte ». Sans qu'on puisse en être absolument certain, il
semble bien que ce phénomène s'est produit aussi sur Birac, au quartier de
Bijoux.
Les premiers endroits qui ont pu s'équiper ainsi sont ceux qui avaient à leur disposition une motte toute faite,
laissée par les hommes préhistoriques. Bijoux a une motte et la similitude du cadre avec Cuilleron, sur Aubiac, qui a des
vestiges préhistoriques et une motte, fait penser que Bijoux est bien un site
préhistorique, avec son vallon encaissé, pierreux, boisé. La motte utilise à l'est la très forte pente du vallon; au nord un minuscule cours d'eau fournit
une bonne dépression, prolongée vers l'ouest par un important creusement artificiel; l'entrée était au sud où l'on avait creusé un fossé, emprunté maintenant
par le chemin. La terre fournie par le creusement était naturellement entassée sur la motte pour
la rehausser et l'on voit encore, au sud et à l'ouest, ce sable très tassé qui ne coule pas.
Normalement sur cette motte s'est formé un petit bourg fortifié, avec une église; puis on a partagé le terroir de Birac
la paroisse de Bijoux était née.
Quand les conditions qui avaient fait naître ces bourgs disparaissent, on renonce à rester entassé et le bourg est
abandonné. L'église continue à être entretenue; même, la disparition des maisons ayant libéré de la place, on peut l'agrandir : il reste encore une des
deux chapelles qu'on y avait ajoutées au XVe.
Autre avatar entre-temps, les agriculteurs ont occupé en premier les meilleures terres, négligeant entre
autres l'intérieur des vallons, boisé et humide. Au XIe, la population ayant augmenté, on se préoccupe de les mettre en culture. Ce travail est souvent
l'ouvre des moines.
Les Lagardère, qui font figure d'ancêtres des seigneurs de Grignols, donnent des terres sur Cours pour y faire venir des Bénédictins ; ceux
ci, par la suite, fondent la petite paroisse Saint Pierre de la Roque, peu avant 1115 ; auparavant, Arnaud Lagardère leur avait donné la moitié de ses biens.
Cette donation et cette paroisse semblent bien se lire sur la carte.
Aux confins de Sendets et Gajac, entre les deux cours
d'eau qui se rejoignent pour former le ruisseau de Birac, un petit plateau triangulaire est partagé artificiellement par la frontière entre les deux
communes, avec le lieu dit La Roque ; l'église devait être là. Cette propriété servait de base de départ pour des défrichements ; depuis là, ils ont remonté
le vallon du ruisseau de Birac, sur près de 2 km Une fois passée la mode des défrichements, les Bénédictins n'avaient plus de raison de rester sur place ;
la paroisse était d'ailleurs trop petite pour être viable et de forme impraticable ; elle a été rattachée en bloc à Gajac.
Il en reste une anomalie : alors que le ruisseau de Birac, avec une dénivellation de 50 m, forme la coupure obligatoire entre Birac
et Gajac, il franchit sur une longue bande le long du ruisseau le versant, défriché par les moines, arrivant presque sous les murs de l'église.
A la Révolution, la formation des communes a réunifié l'ensemble Birac
Bijoux ; on y a même ajouté Sauros, malgré les protestations des habitants qui préféraient aller à Sauviac. L'église de Sauros, délabrée, a finalement été
démolie (1921). Celle de Bijoux a bénéficié de son pèlerinage, centré sur une statue de la Vierge et servi par son cadre
attirant, un peu mystérieux, améliorée au siècle dernier, elle a pleinement sa justification.